DÉSARCHIVER LE PASSÉ

École de la Terre – Tarnac – du 29 juin au 5 juillet 2019 :

DÉSARCHIVER LE PASSÉ

ou

FAIRE HISTOIRE / ÊTRE HISTOIRE

ou

LE RETOUR DE L’ANAMNÈSE

Point de départ : l’envie de donner une suite à la session

« décloisonner l’avenir » (juillet 2017)

On a pu l’appeler « session SF », mais elle fut bien autre chose : une rencontre où il s’agissait avant tout de rouvrir les imaginaires et de suivre des perspectives plus joyeuses que celles de l’effondrement général. À cet égard, nous avions rapidement envisagé une suite : « Réenchanter le présent ». Mais après une discussion avec Jérôme Baschet et Rocio Martinez, autour notamment du dernier livre de Jérôme ( Défaire la tyrannie du présent), et en accord aussi avec ce qui nous semblait pertinent dans la période présente, on s’est dit qu’on s’attacherait plutôt dans l’immédiat à « Désarchiver le passé ».

Défaire la tyrannie du présent : à la recherche d’un nouveau régime d’historicité pour les terriens

« La modernité, selon W. Benjamin , se caractérise précisément dans le déclin de l’expérience transmise, à l’avantage de l’expérience vécue ». Il est vrai que si la métropole offre son lot d’attractions spectaculaires, c’est bien le statut de l’esclave que de ne même plus savoir d’où il vient : autrement dit, c’est bien à dessein que la modernité, et dans sa suite le présentisme, nous priverait de la puissance de notre histoire. Une puissance qu’il s’agit alors de faire remonter à la surface.

L’ensemble de la session sera marquée par la thèse centrale de Jérôme (présentée dans une conférence inaugurale), au regard surtout d’un nécessaire renouvellement de notre « rapport à l’histoire », qui nous semble constituer le premier déplacement nécessaire à toute réflexion émancipatrice. Les propositions qu’il émet nous touchent : pour leur pertinence propre autant que du fait de notre grande considération pour le « monde » zapatiste qui les a inspirées, mais aussi pour la difficulté que nous éprouvons à bousculer concrètement notre quotidien dans leur suite.

Autrement dit, dans ce débat interminable entre pratique et théorie, nous

aimons imaginer qu’il convient aussi de considérer un « autre type » de pratique, une pratique de l’esprit : où il s’agirait d’ apprender a dirigir la mirada (apprendre à diriger le regard), comme disent les mêmes zapatistes…

Pour une histoire des possibles

De la même manière qu’on ne souhaitait pas limiter « décloisonner l’avenir » à une suite de conférences, nous voulons que ces nouvelles rencontres mettent véritablement au travail nos imaginaires politiques.

Jérôme nous a suggéré pour cela l’ouvrage de Quentin Deluermoz et Pierre Singaravélou « Pour une histoire des possibles », à partir duquel ces deux historiens ont déjà mené plusieurs fois des ateliers d’ « histoire contrefactuelle » (ce qui renvoie aux notions d’uchronie sur lesquelles nous avions pu travailler lors de la « semaine SF »). Parmi quelques exemples qui ont déjà pu nous faire délirer : et si les Occitans avaient gagné la bataille d’Albi ? Et si les Mayas ne s’étaient pas effondrés et avaient trouvé l’usage de la poudre à canon avant l’arrivée des colons ? Et si Jeanne d’Arc s’étaient faite tuer dès la première bataille ? Et si Einstein s’était fait écraser par un bus à l’âge de treize ans ? Et si l’insurrection de 1848 avait réussi ? Et si Charles Martel avait perdu la bataille de Poitiers, ou qu’il avait été vaincu quelques années plus tard par l’alliance entre le duc de Provence et les Omeyyades ? Et si l’URSS avait gagné la guerre froide ? Etc.

Pour le dire autrement, on peut tout simplement reprendre la citation de Nietzsche qui ouvre le livre de Deluermoz et Singaravélou :

« La question  »Que se serait-il passé si cela et cela n’avait pas eu lieu ? »

est presque unanimement regardée avec défaveur, et cependant c’est précisément cela qui est la question cardinale ».

Un tel atelier, animé par Quentin Deluermoz dès le week-end d’ouverture, nous permettra de relancer magistralement nos machines à délirer le communalisme – celui qui a été, ou aurait pu être, hier ; celui qui pourrait être demain. Et cela, sans avoir besoin d’une connaissance poussée de l’histoire car comme le disent les auteurs, il s’agit surtout de mettre en travail nos imaginaires politiques.


Comment entrer dans l’Histoire ?

L’histoire, toute « l’Histoire », c’est vaste. 2000 ans de christianisme en ce qui nous concerne, 12000 ans d’agriculture, 100000 ans d’homo sapiens… Comment plonger dans l’Histoire sans s’y noyer ? Notre proposition jusqu’ici est de déterminer des « points d’entrée »

transversaux, plus proches du thème que de la période. Ainsi, après un premier week-end de nourriture intensive, nous partirons sur cinq journées avec chacune leur point d’entrée, en mode petite conférence le matin, travaux en groupes l’après-midi, et concerts, théâtre, écoute d’archives sonores et projections le soir.

Voici les points d’entrée que nous avons envisagés :

  • Christianisme et subjectivités contemporaines :

C’est au fond une évidence, les racines chrétiennes de notre civilisation n’ont cessé de déterminer notre rapport au monde, même après avoir été apparemment marginalisées par la logique capitaliste (voir par exemple le travail de Sylvain Piron dans L’Occupation du monde, qui s’ouvre sur ces mots : « Rien, ou presque, de ce que nous faisons ne va de soi. Nos façon d’agir, de parler, l’organisation de nos pensées obéissent à des motifs dont nous ignorons le plus souvent l’origine »). Comment en finir avec nos invisibles déterminismes chrétiens ? Nous proposons de revenir sur l’histoire de cette chrétienté, en se focalisant peut-être sur les premiers chrétiens, mais aussi sur la scolastique et dans son sillon sur la réforme protestante.

Dans la même idée, (mais peut-être pas dans la même journée !), on pourrait chercher ensemble comment inventer une nouvelle ontologie historique (Georges Lapierre, avec Être ouragans, peut-il nous y aider ?) ; ou encore nous demander que faire du mythe éculé de la démocratie (les travaux de Nicole Loraux et d’autres auteurs dans sa suite, de Françoise Frontisy à Tiqqun, proposent d’excellentes déconstructions de la subjectivité « citoyenne » telle qu’elle est encore fantasmée)…

Intervenant.e.s :

  • Élise Haddad, médiéviste qui travaille sur la naissance du naturalisme à partir du XIIème siècle comme théologie préalable à l’apparition du capitalisme
  • Pierre-Olivier Dittmar, médiéviste, qui proposera une présentation sur le déplacement de l’imaginaire militant de l’antiquité au Moyen-Âge
  • Chloé Maillet, médiéviste et artiste, spécialiste de la question du genre au Moyen-Âge.
  • Hubert Viel, réalisateur du film « Les Filles au Moyen-Âge »
  • De l’élément post-apocalyptique dans l’histoire :

Le dernier avatar de la collapsologie décrit l’effondrement des écosystèmes en même temps qu’elle entérine deux nouveaux objets de perception : la planète et l’anthropos. Ces deux outils, rassemblés sous le vocable à la mode d’anthropocène nous paraissent aussi nuisibles que ce qu’il tentent de décrire. Plus encore l’anthropocène nous semble être le dernier tour de force qui permet à la pensée moderne d’apparaître comme la solution au problème qu’elle a créé. L’effondrement nous apparaît

comme la naturalisation d’une perception, d’un rapport au monde : à la fois de l’universalisme qui tente de confondre la singularité de l’homme moderne avec la diversité humaine, et à la fois la rupture définitive des liens singuliers et situés aux milieux, au profit d’une distance sidérale.

Pour tenter de sortir de cette ornière, nous proposons simplement de revisiter quelques-uns des innombrables effondrements qui ont déjà eut lieu sur la Terre. Des livres sortent actuellement sur le sujet en prenant enfin en compte les pistes du social et de l’environnement. Les impressionnants exodes urbains, les changements climatiques, les crises écologiques, le renouveau des territoires ruraux, les nouvelles religions, les organisations politiques locales et décentralisées, constituèrent souvent l’actualité de telles périodes, qui en réalité reviennent de manière cyclique. Rappelons pour exemple que Rome a vu sa population passer de plus d’un million à 30 000 habitants en quelques décennies. Où sont allés tous ces gens ? Comment ont-ils transformé l’horizon politique des campagnes ? Ont-ils seulement survécu ?

Un point de vue « communaliste » pourrait être envisagé à cet endroit, qui se donnerait pour tâche de saisir non pas tant comment les Empires s’effondrent, que ce qui se passe pendant et après leur chute : déprise du pouvoir sur le territoire, défections massives des habitants, réouverture des possibles pour des options politiques qui avaient été laissées au rang des « vaincues », mais aussi apparition de nouvelles prétentions hégémoniques et nouveaux efforts d’écrasement… Ou comment mieux faire de la place aux jeunes pousses qui suivront la chute de l’hégémonie actuelle.

Intervenant.e.s :

  • Rocio Martinez, au sujet de l’effondrement de l’empire maya.
  • Florent Tillon, qui reviendra en particulier des récits d’effondrement recueillis en Océanie.
  • Et

la Révolution ? :

De 1789 à la Terreur, des nuits du 4 août aux cahiers de doléances, les années « révolutionnaires » ont marqué tout le siècle qui les a suivies, et nous hantent encore aujourd’hui. Comprendre cette période, en particulier dans ce qu’elle a d’inaccompli (les Gilets Jaunes ne revendiquent-ils pas de donner un nouveau souffle à l’idéal de 1789 ?), c’est aussi se confronter à l’imaginaire de la Révolution lui-même, tel qu’il s’est forgé depuis lors, et tel qu’il serait sans doute à (enfin) dépasser. La Révolution, pierre philosophale ou rocher de Sisyphe ?

Intervenant.e.s :

  • Quentin Deluermoz, historien dix-neuvièmiste spécialisé sur la Commune, auteur de plusieurs ouvrages, bon connaisseur de la révolution de 1848.
  • Michèle Riot-Sarcey, auteure à La Découverte du Procès de la liberté, où elle s’exerce

à relater une histoire benjaminienne des luttes populaires de la période de 1848.

  • Sophie Wahnich, auteure de plusieurs ouvrages sur la période révolutionnaire, dont le récent L’Intelligence politique de la Révolution française.
  • Histoires de peuples en lutte :

Sortir des grands récits et de la grande Histoire pour s’intéresser à des histoires « à fleur de peuple ». Les camisards, les paysans révoltés de Müntzer, les Diggers de Londres, les utopies pirates, le marronnage…

autant de « micro-histoires » choisies qui permettront de se plonger dans la vie, les mœurs, les luttes de communautés singulières, aux prises avec leur époque, et en même temps presque toujours assises et renforcées par des traditions d’organisation collective communaliste.

Au fond, si nous savons identifier dans le monde une tradition impériale, peut-être pourrions-nous dresser l’esquisse d’une tradition communaliste diffuse mais millénaire. Existe-t-elle seulement ? Formulé autrement, Le mystère résiderait peut-être dans cette question : pourquoi se retrouve-t-on parfois à ressentir beaucoup plus de proximité avec un exilé soudanais qu’avec son propre voisin ?

Intervenant.e.s :

  • Alessi dell’Umbria, pour ses travaux sur l’Occitanie et l’Histoire universelle de Marseille.
  • Collectif Mauvaise Troupe, pour leurs travaux sur les « territoires en bataille », de Notre-Dame des Landes au Val de Suse et au pays Basque.
  • Collectif, Intervento (intervention théâtralisée à plusieurs voix) sur les années de luttes 2006-2017 en France (en soirée).
  • Des histoires d’ici :

Quoi qu’en disent les adeptes du « village global », il n’y a et il n’y a jamais eu que du local. L’histoire se passe peut-être hier, aujourd’hui, demain, mais elle se joue toujours dans un ici singulier. Comment se raccrocher aux histoires de nos « ici »… celui du Limousin, celui de l’Histoire universelle de Marseille ? Les deux faisant redécouvrir cette grande région anti-centraliste mais finalement vaincue que fut l’Occitanie.

Dans cette journée, nous comptons sortir de notre grange pour parcourir un peu le pays, parler sur un rocher mystérieux ou près d’une source de guérison, et explorer au plus près le concept même de paganisme (le mot païen lui-même étant issu du terme latin paganus désignant le paysan).

Intervenant.e.s :

  • Marie-France Houdart, ethnologue et historienne du Limousin, éditrice et auteure de plusieurs ouvrages sur la question (pratiques païennes et bonnes fontaines, rôle historique des femmes en Limousin…)
  • Jean-Pierre Cavaillé, anthropologue et historien qui s’intéresse en particulier à la culture des gitans et autres gens du voyage en Limousin.
  • Olivier Durif, ancien directeur du Centre Régional des Musiques Traditionnelles, collecteur de musiques limousines, passeur et musicien.

Transversalités (1)
Quelle place dans cette semaine pour une histoire féministe ? Ou décoloniale ? Ou écologique ? L’idée est de les aborder comme d’autres formes de transversalités. Non pas des points d’entrée thématiques, rangés dans leur journée comme le fait l’État avec la journée de la femme, mais comme des points de tension qui courent et habitent toujours-déjà chaque récit, chaque instant (même, ou surtout, en tant qu’impensé). Il y a bien une problématique féministe, décoloniale, environnementale dans tous les sujets qu’on abordera cette semaine.

L’idée de ces transversalités est donc de leur faire de la place chaque jour, que ce soit en apprenant à réorienter le regard pour changer de vision à partir d’un récit premier, ou en se plongeant d’emblée dans des morceaux d’histoire tels qu’ils furent vécus et perçus par les unes ou les autres.

Identité, universalisme, créolisation, racines (Transversalités, 2)

« Les racines, à 85 ans, j’en ai marre… J’ai des racines… mais je ne suis pas un chou. J’ai des identités multiples. La Corrèze c’est au fondement mais grâce au ciel j’ai vu d’autres choses. Et si j’ai vu d’autres choses et si d’autres personnes m’ont fait connaître d’autres choses c’était aussi parce que je venais de cette terre pauvre

et

rude.

Tu

comprends bien que Frantz Fanon n’aurait pas dicté ses livres n’importe comment et à n’importe qui ! »

Marie-Jeanne M., habitante du plateau de Millevaches et secrétaire personnelle de Frantz Fanon en Algérie

La question de savoir qui « nous » sommes, d’où « nous » venons, ou ce qui constitue « en propre » le(s) territoire(s) où nous choisissons de nous ancrer, amène presque naturellement dans son sillage les notions de tradition et d’identité. L’exercice a quelque chose d’exotique quand il prend le nom d’anamnèse, mais l’approcher en ces autres termes paraît paradoxalement (peut-être au regard d’une certaine tradition politique,

celle qui a voulu s’opposer à l’écrasante utopie universaliste) comme jouer avec le feu.

Que faire de ces notions gênantes ? Pour les Kanak de Nouvelle-Calédonie, le problème semble réglé dès l’abord, puisqu’il s’agit justement d’affirmer une identité singulière et irréductible au modèle métropolitain.

De leur côté, les zapatistes n’hésitent pas à se revendiquer descendants des mayas, porteurs d’une tradition spécifique qu’ils sont par ailleurs prêts à questionner ou à réinventer. Et que dire de la controverse qui a opposé il y a quelques années plusieurs auteurs antillais sur le même sujet (voir les ouvrages Quand les murs tombent. L’identité nationale hors la loi ? de E. Glissant et P. Chamoiseau, et la réponse de Monchoachi Le monde tel qu’il est) ?

Plusieurs événements récents ont amené dans notre environnement plus immédiat des problématiques similaires : tel ce mouvement des gilets jaunes qui prend comme lieux d’ancrage les espaces les plus dystopiques de notre environnement urbain pour y planter des drapeaux français, et qui dans le même temps paraît ouvert à tous les possibles ; ou cet éditeur d’ouvrages révolutionnaires (Éric Hazan) qui joue de la provocation en déclarant à la presse que la présence de l’extrême-droite dans ce même mouvement n’est pas forcément un problème « en soi » ; ou encore, ce désagréable article du Monde Diplomatique de juin 2018 ( Le terroir ne ment pas, par Evelyne Pieiller), qui suggère des collusions soi-disant impensées entre les actuelles problématiques « territoriales »

portées par certains discours révolutionnaires contemporains (dont ceux du Comité Invisible ou de la zad de NDDL) et la fameuse formule vichyste selon laquelle « la terre ne ment pas »…

Nous jouons déjà avec le feu, et souvent sans distinguer clairement la diversité de ses foyers (entre identité et créolisation, entre tradition et anamnèse, etc.). Le problème serait peut-être de s’y confronter vraiment, et d’apprendre à mieux déterminer ceux que nous voulons vraiment nourrir, et comment : la question est ouverte.

Faire histoire / Être histoire (Transversalités, 3) Enfin, une dernière idée forte, déjà évoquée en introduction, serait de rechercher une articulation entre ce qui revient régulièrement comme une ambition de la tradition révolutionnaire : l’idée de « faire l’histoire », et ce qui apparaît depuis bien moins longtemps mais avec de plus en plus d’insistance, notamment à travers la voix des peuples qui ont vu l’histoire se faire (sans eux) : l’idée d’ être l’histoire.

Pour illustrer le propos, disons qu’on pourrait parier sans grand risque que la plupart des hommes et des femmes qui ont joué leur vie en détruisant la Bastille n’avaient jamais entendu parler de Voltaire ou de Hobbes – même si c’est pourtant bien ces visions qu’ils ont participé à ériger. L’auraient-ils souhaité en connaissance de cause ? Et qu’en est-il

des Gilets jaunes ? Pour ne pas laisser une révolution FAIRE histoire sans nous, il s’agirait de mieux porter ce que nous désirons, et d’être attentifs à ce qui fait ÊTRE histoire.

Point de coup d’éclat dans cette seconde approche, et pourtant une perspective sans doute non moins porteuse de changement radical : l’insistance de peuples et de communautés déterminés à persévérer dans leur être, à user les empires comme l’eau use les montagnes. Une nouvelle ligne de crête révolutionnaire serait-elle à l’intersection de ces deux approches ? Encore une question qui pourrait être tranquillement mise au travail au fil de la semaine…

Aspects logistiques

À compléter ultérieurement

Notes de lecture et bibliographie

À compléter ultérieurement

Pour toutes questions, inscriptions à la liste, etc. :

ecoledelaterre@riseup.net

Pour en finir

Refrain :

Il y a la petite histoire, la grande histoire, l’histoire des vaincus et celle des vainqueurs. Il y a l’histoire des mœurs, celle du quotidien, l’histoire d’en haut, celle d’en bas, il y a l’histoire des hommes. Il y avait la fin de l’histoire qui s’annonçait comme un triomphe.

Il y avait d’un côté la culture et son histoire et la nature sans histoire régie elle par des lois immuables. Il y avait les femmes trop proches de la nature finalement pour faire partie de l’histoire et il y avait les peuples « premiers » eux aussi sans histoire, venus tout droit de la nuit des temps.

Et puis, depuis quelques temps ça la fout mal…

Le matrimoine se développe, désolé pour le

rapprochement, on commence à reconnaître une culture propre, une histoire à quelques espèces animales, certaines espèces végétales pensent, communiquent, s’adaptent, évoluent, les peuples racines…….

STOP !!!!!!!!!!!!!

Il y a la petite histoire, la grande histoire…… vous connaissez le refrain !

Il y a l’histoire des vaincus, l’histoire des vainqueurs certes, mais il y a aussi autre chose que l’histoire, radicalement autre chose que le rapport au temps, aux choses, aux systèmes de valorisation et aux perceptions qu’elle implique. Ce qui se passe c’est que les vainqueurs s’en sont aperçu, ils savent qu’il y a là une altérité radicale, alors ils font comme d’habitude, ils distribuent les médailles, celles qui brillent, celles dans lesquelles on se reflète. Tout le monde désormais a sa médaille, tout le monde désormais accouche de sa propre histoire, on y va au forceps, le concept est suffisamment élastique. Même certains mouvements féministes ont désormais leurs Grandes Femmes.

La fin de l’histoire, c’est pas ce qu’on raconte, la victoire du capitalisme sur l’histoire politique, non ! La fin de l’histoire c’est quand il y aura de l’histoire partout, quand il n’y aura rien d’autre que de l’histoire !

ARRET D’URGENCE !!!!!!!!!

Tout le monde ne l’a pas pris et que tout le monde ne veut pas prendre le train en marche… Il y a qu’en tant que révolutionnaires, ce n’est pas avec les vainqueurs qu’il faut rompre, pas plus qu’avec leur histoire, mais avec leur système de valorisation, leurs paradigmes et peut-être l’idée d’histoire elle-même, qu’ils ont forgée comme une arme.

Arrachons-nous leurs yeux !

Putain, ça fait du bien, ça nous fait du bien. C’est peut-être eux les aveugles, désormais rien n’est caché, tout est là.

Nastassja Martin parle de la forêt des Gwich’in, les chasseurs parlent doucement, ce que nous appelons le passé est là , l’avenir est là aussi, chaque plante, chaque animal, chaque pierre sont constituées par nos voix, nos intentions même et cela depuis toujours…

C’est de l’histoire ça ?

Les « individus » Inuit sont là depuis toujours. Quand un chasseur renaît, on ne lui parle pas de ses ancêtres dont il reprendrait le flambeau ou le prestige, on lui parle de lui, de lui depuis la nuit des temps en effet. Lui peut être le père et le fils en même temps. Il est né avant que la mémoire existe, ce ne sont pas ses aïeux à qui il a succédé, il s’est succédé à lui-même. Le clan Inuit est toujours le même, il a toujours été le même dans la métamorphose, le métatemps, pourquoi pas ?

Ça s’appelle de l’histoire ça peut-être ?

Une amie énergéticienne, comme on les appelle

maintenant, me dit qu’elle pratique des soins dans le passé, dans le présent ou l’avenir, que tout cela n’a aucune importance… On se dit tout doucement : Putain, la copine, elle est vraiment ché-per ! Et la physique quantique, c’est du sérieux ça ! C’est du Einstein ça ! Qu’est ce qu’il dit depuis plus d’un siècle ? Que le temps n’existe pas, tout simplement.

Et ça c’est quoi ? C’est de l’histoire ça peut-être ? Enfin vous connaissez le refrain, nous proposons d’aller voir un peu de ce côté-là…


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